L’épidémie de Covid-19 et l’annonce du confinement ont suscité pour la population une certaine crainte, laquelle a en particulier été ressentie par les salariés et agents publics qui ont été contraints, dans ce climat anxiogène, de continuer l’exercice de leurs fonctions indispensables à la vie du pays.

L’absence de masques, l’insuffisance du gel hydroalcoolique, la présence de plus de cent personnes dans un même espace malgré les interdictions ont conduit de nombreux agents publics à exercer leur droit de retrait.

Tel a été le cas des agents de la plateforme industrielle du courrier  de Wissous qui ont fait valoir le droit de retrait, ce qui a donné lieu à un contentieux à l’issue duquel le tribunal administratif a jugé que la Poste ne pouvait pas effectuer de retenue sur salaire le temps de l’exercice par les agents de leurs droits de retrait, celui-ci ayant été justifié.

 

L’exercice du droit de retrait suppose que l’agent se trouve dans une situation lui laissant penser qu’il se trouve lui-même face à un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé. Dans la mesure où le droit de retrait est justifié dès lors que l’agent a un motif raisonnable de penser que la situation présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, l’usage de ce droit repose sur une appréciation subjective de la perception du danger par l’agent lui-même. L’exercice de ce droit se fonde ainsi sur le sentiment personnel de l’existence d’un danger grave et imminent, et non sur l’existence objective d’un danger. 

 

Sans doute, la question de savoir si l’exercice du droit de retrait par l’agent a été légitime, suppose en principe une appréciation individuelle. Cependant, il existe des circonstances qui, de par leur nature, leur intensité, ou leur caractère exceptionnel, génèrent par elles-mêmes, chez toute personne, une crainte d’un danger grave et imminent, indépendamment de l’état de santé de la personne ou de sa sensibilité. 

 

S’agissant de la perception du danger résultant de la pandémie de Covid-19,  le caractère exceptionnel de cette pandémie, la couverture médiatique et les mesures tout aussi exceptionnelles prises par le gouvernement ont nécessairement eu une incidence sur la perception des travailleurs du danger. 

 

C’est la raison pour laquelle doit être relativisée la portée des mesures prises par les entreprises pour apprécier le caractère raisonnable du motif de penser que la situation de travail présentait un danger grave et imminent pour la vie ou la santé, lequel peut être apprécié compte tenu du niveau d’exposition au virus des travailleurs au regard de leur situation de travail, de la promiscuité des postes de travail, de l’utilisation des transports collectifs, des entrées et sorties des lieux de travail concentrées sur des périodes de temps très brèves, ou du contact rapproché avec le public.

 

Dans le cas des agents de la Poste exerçant leurs fonctions sur les machines de tri du courrier, le tribunal administratif de Versailles a, par un jugement du 17 avril 2022, jugé qu’ils avaient un motif raisonnable de penser que la poursuite de leur fonctions présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.

Un appel a été formé contre ce jugement et est actuellement en cours d’instruction.

 

Pour en savoir plus : http://versailles.tribunal-administratif.fr/A-savoir/Communiques/Le-tribunal-annule-les-decisions-de-La-Poste-operant-des-retenues-sur-traitement-en-raison-de-l-exercice-par-ses-agents-du-droit-de-retrait-lie-a-l-epidemie-de-Covid-19-et-enjoint-a-la-societe-La-Poste-la-restitution-des-sommes-indument-retenues