Le harcèlement scolaire peut être défini comme le fait pour un élève d’être « soumis de façon répétée et à long terme à des comportements agressifs visant à lui porter préjudice, le blesser ou le mettre en difficulté de la part d’un ou plusieurs élèves » (définition établie par Dan Olweus, professeur de psychologie à l’université de Bergen, reprise par une circulaire du ministre de l’éducation nationale du 13 août 2013 relative à la prévention et lutte contre le harcèlement à l’école).

Un état des lieux inquiétant

Dans le milieu scolaire, le harcèlement touche une partie non négligeable des élèves.

A cet égard, les statistiques sont édifiantes : selon le rapport 2023 de l’enquête PISA, 24 % des filles et 20 % des garçons de 15 ans interrogés en France ont déclaré être victimes d’actes de harcèlement au moins quelques fois par mois. 8 % des élèves ont déclaré que leurs camarades avaient répandu des rumeurs désagréables à leur sujet.

Des conséquences non négligeables

Le harcèlement scolaire emporte bien souvent des conséquences très lourdes sur les élèves qui en sont victimes.

Outre qu’il affecte généralement les résultats scolaires, le harcèlement a des conséquences sur le bien-être des élèves ainsi que sur leur santé mentale.

Cela se traduit par l’impossibilité de trouver sa place dans l’environnement scolaire, un absentéisme scolaire, des difficultés pour trouver le sommeil, un sentiment dépressif, voire des idées suicidaires.

Ce phénomène est notamment documenté par un rapport des académies nationales des sciences, de l’ingénierie et de médecine des Etats-Unis qui souligne que le fait d’être victime de harcèlement est un important facteur de risque de dépression, voire d’idées suicidaires et qui mentionne une étude écossaise portant sur plus de 5 000 adolescents, selon laquelle tant les élèves victimes de harcèlement que ceux pratiquant de tels actes sont deux fois plus susceptibles de souffrir de problèmes de sommeil que les autres élèves.

De telles conséquences se ressentent y compris au long-terme ; une étude de 2014 montre ainsi que les adolescents fréquemment victimes de harcèlement sont deux à trois fois plus susceptibles de développer un trouble anxieux cinq ans plus tard, à l’âge de 18 ans, que les adolescents non victimes.

En somme, non seulement le harcèlement scolaire est un important facteur de risque pour la santé mentale des élèves victimes de harcèlement, mais il contribue à un important mal-être ainsi qu’à de mauvais résultats scolaires.

 

Des outils juridiques à la disposition des familles

 Le premier réflexe des familles doit évidemment être d’interpeller la communauté éducative et de recourir aux numéros dédiés (3020 et 3114 pour la prévention du suicide), mais le droit doit également être mobilisé.

 

Le harcèlement est, en effet, une infraction, définie par le code pénal, consistant en des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale.

Lorsqu’il est commis à l’encontre d’un élève par un autre étudiant ou toute personne travaillant au sein de l’établissement, le harcèlement est puni d’une peine maximale de trois ans d’emprisonnement, voire davantage en cas de circonstances aggravantes (article 222-33-2-3 du code pénal).

Le harcèlement scolaire doit, en premier lieu, être combattu par l’institution scolaire, qui est dans l’obligation de prendre des mesures de sanction ou d’organisation du service  pour protéger les élèves.

En effet, l’article L. 111-6 du code de l’éducation prévoit qu’« aucun élève ne doit subir de faits de harcèlement » et impose aux établissements d’enseignement de prendre « les mesures appropriées visant à lutter contre le harcèlement dans le cadre scolaire et universitaire ».

Ces mesures consistent notamment en de la prévention, de la détection et une obligation de « réponse rapide et coordonnée » en cas de harcèlement.

Le projet d’école ou d’établissement, doit désormais fixer les procédures en matière de lutte contre le harcèlement, comme l’impose l’article L. 543-1 du code de l’éducation.

A terme, l’ensemble du personnel de l’éducation nationale doit recevoir, dans sa formation initiale, une formation à la prévention des faits de harcèlement, ainsi que le prévoit l’article 5 de la loi n° 2022-299 du 2 mars 2022 visant à combattre le harcèlement scolaire.

Dans les collèges et lycées publics,, le chef d’établissement peut prononcer lui-même des sanctions d’avertissement, de blâme ou d’exclusion temporaire, voire saisir le conseil de discipline pour exclure définitivement un élève qui se livrerait à des actes de harcèlement.

Si le chef d’établissement, saisi en ce sens par un parent d’élève, refuse d’engager une procédure disciplinaire, il doit justifier par écrit son choix.

Dès lors qu’il est établi qu’un élève commet des actes de harcèlement – y compris du cyberharcèlement –, le chef d’établissement est tenu d’engager une procédure disciplinaire.

Un parent dont l’enfant serait victime de harcèlement scolaire peut donc saisir le chef d’établissement d’une demande d’engager une procédure disciplinaire, et contester un éventuel refus de le faire.

Dans les écoles primaires, le décret n° 2023-782 du 16 août 2023 a aussi précisé que, lorsque le maintien d’un élève constitue un risque pour la santé ou la sécurité d’autres élèves malgré la mise en œuvre des mesures décidées par le directeur d’école, le directeur académique des services de l’éducation nationale peut demander au maire de procéder à la radiation de l’élève de son école.

Dans tous les cas, une procédure consistant dans une demande indemnitaire peut également être envisagée à l’encontre de l’Etat afin qu’il indemnise l’élève victime de harcèlement et sa famille, s’il apparaît que l’établissement scolaire n’a pas réagi efficacement à la situation.

Pour les situations les plus extrêmes, la saisine de l’autorité administrative par l’intermédiaire d’un avocat et la saisine du juge administratif figurent ainsi parmi les outils qui peuvent être mobilisés pour mettre fin au harcèlement vécu par un enfant dans l’enceinte scolaire et réparer ses conséquences.

Une procédure d’urgence peut même être mobilisée : ainsi, le juge des référés du tribunal administratif de Melun a pu juger que le droit, pour un élève, de ne pas être harcelé constituait une liberté fondamentale au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative. Dans ces conditions, il a estimé qu’une action en référé pouvait être introduite pour que soit ordonner à l’administration de faire cesser ces agissements dans un délai de 48 heures (Ordonnance du tribunal administratif de Melun du 7 mai 2021, n° 2104189).